Pharmacie / Hygiène

AÉSIO Santé : une formation pour sécuriser le circuit du médicament


Publié le Mardi 4 Mars 2025 à 11:48

Dans le cadre de sa démarche d’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins, le groupe mutualiste AÉSIO santé a souhaité former l’ensemble des équipes de ses établissements et services médico-sociaux (ESMS) aux bonnes pratiques de sécurisation du circuit du médicament. Portée par son institut de formation le Campus des Talents, l’initiative a déjà bénéficié aux 713 salariés des EHPAD et est ouverte aux ESMS tiers.


« La sécurisation du circuit du médicament représente un réel défi dans le secteur médico-social, eu égard à la multiplicité des intervenants et aux fragilités de la population accueillie. Partant de ce constat, la direction de la filière médico-sociale du groupe AÉSIO Santé a sollicité le Campus des Talents, son institut de formation, pour la création d’une formation sur-mesure, en e-learning, autour de cet enjeu de santé publique », explique Romain Séon, coordonnateur des soins pour le territoire Ardèche-Drôme et co-concepteur de cette formation aux côtés du Docteur Philippe Terrat, directeur médical des EHPAD pour le groupe AÉSIO Santé, et de l’équipe du Campus des Talents.

Ils commencent à y réfléchir dès l’été 2022, avant de créer un premier groupe de travail en janvier 2023. Son ambition est double : proposer une formation complète, c’est-à-dire couvrant l’ensemble des étapes du circuit du médicament, mais dont le format et le contenu seront néanmoins accessibles à tous. « Dès le départ, il nous a semblé important que tous les métiers puissent bénéficier de la même formation, y compris sur les champs ne les concernant pas directement. Par exemple, la prescription n’est pas du ressort des aides-soignants. Pour autant, il nous a paru utile de les sensibiliser aux bonnes pratiques de prescription, car ce savoir peut leur être utile lorsqu’ils sont amenés à consulter un médecin pour eux-mêmes ou un proche. Il faut imaginer le circuit du médicament comme une chaîne où chaque maillon a un rôle à jouer, y compris, lorsque cela est possible, le patient lui-même », note le Dr Philippe Terrat.

Une formation à la fois ludique et certifiante

Se basant sur les bases documentaires existantes, comme les référentiels de la Haute autorité de santé et les recommandations de bonnes pratiques, le groupe de travail s’est également inspiré des travaux des OMEDIT, les Observatoires du médicament, des dispositifs médicaux et de l’innovation thérapeutique, et particulièrement ceux de l’OMEDIT des Pays de la Loire autour de la sécurisation du circuit des produits de santé en EHPAD. « En ce qui concerne le circuit du médicament, le secteur sanitaire et le secteur médico-social partagent les mêmes bonnes pratiques en termes de sécurité et d’hygiène. Ils ont toutefois des contraintes différentes, liées aux formes pharmaceutiques utilisées – il y a par exemple très peu d’injectables en ESMS – et à l’organisation même du circuit sur le terrain. Ainsi, rares sont les ESMS à disposer d’une pharmacie à usage interne. Les établissements et services médico-sociaux du groupe AÉSIO Santé travaillent exclusivement avec des pharmacies d’officine, et ce paramètre devait être pris en compte lors de la construction de la formation », précise le Dr Terrat.

Celle-ci est finalement construite autour de six séquences courtes, pour une durée totale de 3h30 : (1) identification des risques inhérents à la prescription, (2) mise en œuvre des contrôles permettant d’assurer une bonne dispensation, (3) repérage des risques liés au stockage des médicaments au sein de l’établissement, (4) bonnes pratiques de préparation des traitements et d’aide à la prise, (5) modalités de surveillance des risques adaptées à chaque traitement, et (6) gestion des événements indésirables graves dus à la iatrogénie médicamenteuse. « Nous avons souhaité créer quelque chose de très interactif, avec des quizz, des mises en situation, et même une chambre virtuelle des erreurs. Pour autant, il fallait trouver le juste équilibre entre cette dimension ludique synonyme d’attractivité, et le fait qu’il s’agit d’une formation certifiante. Un certain nombre de points doit être obtenu pour la valider », précise Romain Séon.

Un effet fédérateur

Début 2024, la formation est prête à être déployée. « Nous l’avons ouverte par vagues, ce qui nous permettait de mieux suivre les avancées sur le terrain. Ainsi, la première vague a concerné les directeurs, les cadres et les médecins. Ce fut ensuite au tour des infirmiers, et enfin des aides-soignants. La formation a également été proposée aux pharmaciens d’officine ayant noué des conventions avec les établissements du groupe. Ce sont, au total, 713 professionnels qui en ont bénéficié en 2024, soit une grande partie des salariés éligibles au sein des EHPAD », détaille Annette Bellet, la responsable du Campus des Talents. La dynamique se poursuit à présent auprès des équipes du secteur handicap, et devrait, courant 2025, bénéficier à celles des ESMS du groupe qui ne l’ont pas encore mis en place. À savoir aussi : cette formation est ouverte aux structures ne relevant pas du groupe mutualiste, à l’instar du reste de l’offre du Campus des Talents qui est, rappelons-le, un institut certifié Qualiopi et habilité dans le cadre du dispositif DPC.

L’accueil est en tout cas très positif. « Nous avions au départ quelques interrogations sur la perception de la formation par les différents métiers : allaient-ils tous y adhérer ? Le choix du format numérique était un autre point de vigilance, car il s’agit d’une approche nouvelle dans le monde médico-social. Les enquêtes de satisfaction réalisées auprès des stagiaires nous ont toutefois rassurées, sur la forme comme sur le fond. Si chaque métier est effectivement venu à la formation avec des attentes qui lui sont propres, tous y ont trouvé des réponses à leurs questions. Et, en termes de prise en main, les différents modules ont été accessibles à tous, quels que soient l’âge, la génération ou la pratique de l’informatique », ajoute-t-elle. La montée en compétences des stagiaires est pour sa part perceptible dès les évaluations pré- et post-formation, et ses bénéfices se concrétisent rapidement sur le terrain. « La participation à la formation a eu un effet fédérateur, en permettant la mise en place de projets d’établissements autour de la sécurisation du circuit du médicament », indique Romain Séon.

Une initiative aisément reproductible

« Certaines résidences ont par exemple modifié l’architecture des locaux de stockage des médicaments, elles ont repensé leurs stocks tampons et stocks d’urgences, acquis des chariots de distribution des traitements – l’ouverture de la formation aux directeurs d’établissement a sans doute été ici un facteur facilitant… D’autres ont pu identifier, et corriger, des pratiques qui n’étaient pas tout à fait dans les clous, par exemple pour la préparation des médicaments en goutte, en embarquant également les médecins traitants », raconte ainsi le Dr Philippe Terrat. Cette dynamique vertueuse a été rendue possible par l’implication de tous, celle des directeurs et des équipes des établissements concernés, qui se sont organisés afin que chacun puisse dégager du temps pour la formation, mais aussi du groupe AÉSIO Santé, qui leur a laissé la souplesse nécessaire.

« Toutes les options étaient possibles : mise à disposition de postes de travail dédiés, réalisation de la formation en télétravail, organisation de sessions groupées… Cela a certainement favorisé l’adhésion de tous. Il y avait cependant des contraintes temporelles, chaque vague ayant une durée clairement délimitée », précise Romain Séon. Pensé pour faciliter le suivi du taux de formation des différents métiers, ce calendrier n’a toutefois pas été vécu comme un obstacle. « Bien sûr, il a parfois été nécessaire d’envoyer un rappel aux retardataires. Mais, de manière générale, nous avons surtout observé une réelle émulation autour de la formation et des scores obtenus par les stagiaires, entre les résidences et à l’intérieur d’une même résidence. Les résultats escomptés semblent être au rendez-vous, preuve, s’il en est, que nous avons visé juste. Et ce succès peut être reproduit ailleurs, car cette formation est ouverte à tous  », conclut le Dr Philippe Terrat.

> Article paru dans Ehpadia #38, édition de janvier 2025, à lire ici 


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